Plantes pièges

Exemple de plante piège

Ce qu’il faut retenir : Les plantes pièges sont des plantes qui attirent le ravageur, ce qui le détourne partiellement de la culture. Elles sont une piste de biocontrôle prometteuse dans la lutte contre D. suzukii

Principe de la méthode

Les plantes pièges sont des plantes qui attirent davantage le ravageur que la plante cultivée. Ce sont donc des leurres. Elles sont placées soit autour de la culture, soit à l’intérieur de la parcelle. Leur rôle est de détourner le ravageur de la culture à protéger. Il s’agit soit de plantes sensibles au ravageur qui seront détruites avec lui, soit de plantes résistantes qui lui sont néfastes (libération de toxines, fruits inadaptés, réaction hypersensible…). 

D. suzukii est un ravageur très polyphage des cultures fruitières, également capable d’utiliser les fruits charnus d’un très grand nombre de plantes sauvages et ornementales avoisinant les champs cultivés. 

Cette polyphagie représente un avantage pour l’insecte lorsqu’elle lui assure un grand nombre et une continuité temporelle de ressources. 

Cependant, comme d’autres espèces d’insectes, la polyphagie a un coût et peut amener D. suzukii à pondre ses œufs dans des fruits de plantes inadéquats au développement des larves et dans lesquels elles finissent par mourir. 

Par ailleurs, l’insecte peut aussi perdre beaucoup de temps à faire un choix entre plusieurs types de fruits et pondre moins d’œufs lorsque les choix sont multiples. C’est dans ce cas de figure que les plantes pièges présentent un intérêt.  

Etat actuel des connaissances

À ce jour, un panel de plantes sauvages (67 espèces, Poyet et al. 2015) a été testé et certaines pourraient être utilisées comme plantes pièges. 

De nouveaux essais ont été réalisés en 2017 sur des Rosacées. qui se révèlent potentiellement très intéressantes pour piéger D. suzukii

L’idée est donc de mettre en compétition les fruits cultivés et les fruits des plantes pièges pour perturber les choix de ponte de la drosophile. 

Les causes de mortalités des larves dans les fruits des plantes pièges restent toutefois encore inconnues (fruits trop fibreux, manque de nutriments et d’eau, présence de composés toxiques…). 

Le projet DS2

L’évaluation de l’efficacité des plantes pièges contre D. suzukii fait partie du projet CASDAR DS2. Les partenaires en charge de ces essais sont : Edysan, le CTIFL et l’APREL. 

Les essais conduits en conditions contrôlées et en cages ont mis en évidence l’intérêt du pyracantha (Pyracantha coccinea) en tant que plantes pièges de D. suzukii. 

En effet, en présence de corymbes de pyracantha, les fraises présentes à proximité sont significativement moins attaquées. Le nombre de D. suzukii émergeant des fraises est réduit de 47% en présence de pyracantha et l’on observe aucune émergence des fruits de la plante piège. 

A partir de ces travaux, des essais ont été réalisés en serre, dans des conditions de production. La quantité de plantes pièges était plus faible (25 plantes/100 m² et 1,5 plantes/100 m²), et les plantes étaient relativement jeunes, avec une fructification moins importante. 

Dans ces essais en conditions de production, la plante piège n’a pas permis de réduire l’infestation par D. suzukii

De plus, cet arbuste est peu adapté pour être installé sous serre (épines, port buissonnant) et nécessite un entretien fréquent pour ne pas gêner le personnel. 

Enfin, la maturité des baies est tardive (août/septembre) ce qui ne permet pas de protéger les cultures de façon précoce.

Des travaux complémentaires sont nécessaires pour mettre au point une stratégie efficace basée sur les plantes pièges.

Il serait intéressant d’évaluer l’intérêt de P. coccinea dans les haies proches des cultures pour détourner D. suzukii des fruits cultivés, ou réduire la population de mouches adultes hivernantes et ainsi limiter les risques pour les parcelles environnantes à la saison suivante. 

D’autres espèces peuvent constituer des plantes pièges intéressantes et pourraient être étudiées comme le laurier du Portugal (Prunus lusitanica) ou la garance des teinturiers (Rubia tinctorum). 

Enfin, la méthode des plantes pièges devrait être couplée avec d’autres stratégies pour assurer une efficacité suffisante. 

Pour en savoir plus

Protection contre Drosophila suzukii à l’aide de plantes pièges – Présentation des résultats du projet DS2 par Anthony Ginez (APREL), Benjamin Gard (CTIFL) et Olivier Chabrerie (EDYSAN, UMR 7058 CNRS, Université de Picardie Jules Verne)

Implanter des plantes pièges de bioagresseurs (https://ecophytopic.fr/)

Bibliographie

Kenis M, Tonina L, Eschen R, van der Sluis B, Sancassani M, Mori N, Haye T, Helsen H (2017) Non-crop plants used as hosts by Drosophila suzukii in Europe (vol 89, pg 735, 2016). J Pest Sci 90: 985–985

Poyet M., Le Roux V., Gibert P., Meirland A., Prévost G., Eslin P. & Chabrerie O. 2015. The wide potential trophic niche of the asiatic fruit fly Drosophila suzukii: the key of its invasion success in temperate Europe? PLoS ONE. 10 (11): e0142785.

Ulmer, R., Couty, A., Eslin, P., Gabola, F., & Chabrerie, O. (2020). The firethorn (Pyracantha coccinea), a promising dead-end trap plant for the biological control of the spotted-wing Drosophila (Drosophila suzukii). Biological Control, 150, 104345.